6 mars 2006
réveil nocturne
Quand le flux de la nuit me coule sur les lèvres
Me couvrant le menton avec un sang tout noir,
Lentement soulevé par le bœuf du sommeil,
Je sens tourner en moi l'axe de mon regard.
J'entre dans le champ clos de ma chair attentive
Au pays qui respire et qui bat sous ma peau.
Mes os sont les rochers de ces plaines rétives
Où pousse une herbe rare appelée arlisane,
Et comme un voyageur qui arrive de loin
Je découvre en intrus mon paysage lointain.
(Jules Supervielle, La Fable du monde, "Nocturne en plein jour")
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